
Depuis que la ville de Goma est passée sous le contrôle du M23, la population vit sous une chape de plomb. Si les fusils se sont tus, la pression, elle, est quotidienne et financière. Chaque ménage est désormais contraint de verser deux dollars par mois au nouveau pouvoir rebelle. Une taxe d’assentiment présentée comme une contribution à la « stabilité », mais perçue par les habitants comme une humiliation de plus.
« Ils disent que c’est pour le bien de la communauté, pour la sécurité », raconte Josué, vendeur ambulant de recharge téléphonique à Birere. « Mais la vérité, c’est qu’on n’a pas le choix. Si tu ne paies pas, tu t’exposes à des représailles ».
Une organisation méthodique de la pression fiscale
Dans les quartiers populaires comme Mabanga Sud, Katoyi ou encore Majengo, des jeunes en civil sillonnent les rues, munis de registres. Ils se présentent comme membres du « comité local de gouvernance populaire », nouvelle structure imposée par le M23 pour la collecte des textes. Leur mission : recenser les ménages et percevoir la taxe.
« Ils sont organisés. Ils passent maison par maison, et promette revenir chaque mois. Certains ont même des reçus écrits à la main », explique Bernadette, coiffeuse à Katindo. « Mais ça ne change rien : c’est de la peur, pas de l’administration ».
Une ville étranglée par l’occupation silencieuse
Depuis l’instauration de cette taxe, la grogne monte dans les quartiers. Mais les habitants osent à peine parler. Les arrestations arbitraires, les perquisitions nocturnes et les disparitions mystérieuses alimentent la psychose.
« On nous contrôle, on nous taxe, mais personne ne nous aide à vivre », lâche un enseignant du quartier Himbi. « Les écoles sont vides, les hôpitaux manquent de tout. Et pendant ce temps, on doit cotiser pour un système que personne n’a choisi ».
Une économie asphyxiée, une dignité blessée
Pour les petits commerçants et les familles déplacées récemment installées à Goma, cette taxe est la goutte de trop. L’économie urbaine, déjà fragilisée par les combats et les coupures de circuits logistiques, s’effondre sous la pression de ces contributions forcées.
« Deux dollars, c’est peut-être rien à Kinshasa, mais ici, c’est le prix d’un repas pour trois jours », s’indigne un jeune maçon du quartier Lac Vert. « Ce n’est pas une taxe, c’est une punition collective ».
Des voix étouffées mais pas éteintes
Malgré la peur, certains osent encore parler à visage couvert. Des prêtres, des enseignants, des militants de la société civile murmurent leur désespoir, espérant une libération que l’on tarde à voir venir.
« Goma, c’est le cœur de l’Est. Si Goma tombe et que tout le monde se tait, alors c’est toute la RDC qui est en danger », prévient une responsable associative cachée à Mugunga.
La Rédaction